Coup de Poing

L’apologie de l'improvisation

Appolinaire GOLOU 23/09/2019 à 13:36

La mue du football béninois passe aussi par la formation des entraîneurs. Un maillon important de la chaîne. Selon le Publiciste Arnaud Boti, « la formation est l’essence de tout succès ». Or, la vulgarité du modèle conçu et l’appréhension qu’on a du métier d’entraîneur au Bénin offre en holocauste à l’autodafé, le développement de ce sport roi. Comme un mal congénital, la formation sur le tas phagocyte tacitement le football béninois. Bien qu’étant un contre-sens absolu qui ne pourrait résister aux dures lois du foot moderne, elle s’érige en modèle. De facto, le patinage des clubs béninois engagés dans les « compétitions-CAF » qui n’est d’ailleurs pas un acte isolé, tient sa raison d’être aussi du niveau des entraîneurs, promus à leur tête. Sans pedigree valable pour le moins en accord avec les exigences du football moderne, ces techniciens sont résolus à faire le tour du Bénin, parce qu’ils n’ont pas l’audace d’aller voir ailleurs. Incapables cependant de vendre leur talent en dehors des frontières béninoises, certains se la jouent orgueilleux. Ils en sont comme des poux, fiers d’une piteuse situation conclue souvent par un aller-retour entre clubs et sélections nationales, au meilleur des cas, pour des séjours éclairs. Préférant la promiscuité au modèle assumé, ils vivotent et broutent leur blé dans le grand bazar du foot béninois. Un jonglage, susceptible de planter dans le cercueil de ce sport dit roi au plan national, son dernier clou ; et qui partant, est loin de nous émoustiller. Au contraire, la sortie prématurée des clubs béninois engagés sur le continent chaque saison est devenue un « running gag », désormais embêtant. Surtout au regard des indicateurs du Onze National qui a mis la barre haut à la dernière Coupe d’Afrique des Nations. Avec une aisance consommée, Stéphane Sessègnon et ses coéquipiers ont établi ce record d’un Bénin qui sans être un foudre de guerre, se refuse dorénavant de servir de faire-valoir dans une compétition. Contrairement à l’équipe nationale, les clubs et leurs entraîneurs continuent de broyer du noir à chaque sortie sur le continent. Esae FC encore en lice pour la C2 ne nous enchante guère. Tellement nous avons échoué. D’une part, on peut en effet jeter la pierre à la faîtière, c’est-à-dire la fédération béninoise de football (FBF) pour sa nonchalance à s’arrimer au modèle exotique et par voie de conséquence, permettre aux clubs d’être en jambe pendant les « compétitions-CAF » à travers la reprise à temps du championnat. D’autre part, on se doit aussi de remettre désormais en cause, la capacité de ces entraîneurs qui les dirigent. Sont-ils prédisposés à bien lire et en toute lucidité, le jeu de l’adversaire, ses choix tactiques, et à aisément les contourner ? Point n’est besoin de sortir de la Faculté des Sciences Sportives de l’Université de Leipzig pour savoir qu’au haut niveau, l’entraineur n’apprend plus au joueur à amortir ou faire un centre en retrait. Son rôle est de déceler les failles de l’adversaire et adapter à l’opposé, son plan, pour faire gagner son équipe. En refusant de se faire former adéquatement après leur carrière, les coaches béninois dans leur majorité révèlent leur incapacité à saisir le poids d’une tradition et la dimension réelle, quoique « bankable », du football. Le lent accouchement de la formation après carrière au Bénin est le vrai critère, défavorisant les clubs à arracher à la dure, une concurrence et gagner des matchs sur le continent. Toutes divisions confondues, combien d’entraîneurs, coach d’un club béninois ont reçu en bonne et due forme, une formation après leur carrière ? Ils sont combien à avoir le diplôme qui permet de diriger un club de D1 ou une sélection nationale, quelle que soit la catégorie et à sortir de gros moyens pour aller se faire former ? Après la formation organisée par l’ancien Directeur de l’Education de la FBF auprès de la Caf, Rafiou Gazaliou en août 2014, combien d’opportunités n’a-t-on pas gâché du fait des crises ? Sans faire l’éloge du manichéisme, l’évidence est que le manque d’ambitions des entraîneurs constitue la première cause des mouvements qui les font valser seulement à travers le Bénin. Et, l’exhibition des liquettes depuis le bureau ou le salon des présidents de clubs pour démontrer qu’on a signé dans un nouveau club, la conséquence. Or, cette façon de forger leur personnalité est loin de convaincre au-delà des tropiques. La preuve, il est rarissime d’entendre qu’un entraîneur béninois a signé en Europe, ou tout proche, en côte d’Ivoire, au Mali, au Burkina Faso, au Sénégal, au Togo…
C’est dire donc que le ver est dans le fruit et leur crucifix au-delà des frontières n’est plus à rechercher outre manche. Dans un métier aussi noble que le foot, on ne doit guère, en termes de formation, donner sa part au chien. Entre la théorie des « Injepsiens » qui jouent aux érudits et la réalité, l’écart est abyssal.
Sans formation, ils sont forclos à candidater pour prendre une sélection ou un club hors du Bénin. Hélas ! Cela échappe paradoxalement même à leur creuset : l’Union Nationale des Entraîneurs, Educateurs et Cadres Techniques du Football béninois (UNICATEF-Bénin). Pourtant les quelques rares parmi eux qui l’ont fait, en connaissent le bien-fondé.

Appolinaire Golou




 
 

 
 
 

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